Véronique Strasser donne à voir ici des Portraits de famille singuliers. Entre réalité et fiction, à rebours de la personnification anthropomorphique, les humains s’incarnent dans des animaux mi-réels mi-imaginaires, reflets d’un parallèle amusé et affectueux entre les traits des uns et le caractère des autres. 

Prolongeant la proposition des dessins, Suzanne Rivier livre en contrepoint de courts textes, brossant un scénario où la réalité n’a plus aucune place.

François Ruegg a été invité à participer en 2022 à plusieurs expositions collectives, perspective stimulante à l’origine de cette publication anticipée. Myriam Poiatti et Suzanne Rivier ont choisi quelques termes qui semblaient les plus pertinents pour croiser leurs regards sur ces Formes critiques. Il aurait évidemment été possible d’en ajouter bien d’autres : humour, inquiétude, décalage… sans pour autant atteindre à l’exhaustivité !

VENISE > Homo Faber. Crafting a more human future – Porcelain virtuosity, organisée par la Michelangelo Foundation, Fondazione Giorgio Cini,10 avril – 1er mai 2022 

YVERDON-LES-BAINS > Comment changer du plomb en or, organisée par Visarte Vaud, C.A.C.Y. Centre d‘art contemporain d‘Yverdon-les-Bains, 11 sept. – 6 nov. 2022 

NYON > Melting Pot, organisée par Swissceramics, château de Nyon, 15 sept. 2022 – mars 2023

L'exposition était axée sur la présentation d'une "couverture" textile composée de couvercles de boites d'allumettes en carton reliées au crochet, découverte en Italie vers la fin du XXe siècle. Un objet improbable dont on ne connaît pas la fonction précise, qui n’est pas une œuvre d’art, ne relève pas de l’art brut, et aux qualités esthétiques discutables. Le regard porté sur lui par les acteurs du projet s’est immédiatement affranchi de ce qui généralement attire l’attention : la signature d’un artiste connu, l’aura d’une célébrité qui l’aurait réalisé, une provenance prestigieuse... C’est bien la réalisation elle-même, avec sa singularité et l’histoire de sa découverte, qui a intrigué, captivé, donné dès l’abord envie d’en savoir plus. Comme si elle était capable, en dehors de tous les codes et malgré sa modestie domestique, de ré-enchanter les regards. 

En parallèle, les questions factuelles ouvraient sur d’autres réflexions touchant à la notion de création elle-même, et au statut que l’on accorde aux œuvres en fonction de celui préalablement accordé à l’auteur. Qu’en est-il d’un objet dont rien ne détermine la filiation ou l’usage ? Peut-il être façonné par les regards portés sur lui et les interprétations qu’il génère ? Peut-on accepter qu’il ne soit en rien univoque et qu’il s’affirme comme tel ? 

Ce qui a relié les acteurs de ces TRAMES, c’est de vouloir se pencher le plus sérieusement du monde sur cette trouvaille incongrue, et peu à peu, l'imaginaire prenant le relais, mettre en forme les évocations qu'elle a fait naître: Eliane Beytrison (dessins), Silvano Cattaï (film et photographies), Geneviève Guhl (lectures et photographies), Suzanne Rivier-Devèze (fiction). En contrepoint, d’autres objets témoignent du besoin impérieux de créer lors d’une incarcération réelle (Soha Bechara). Et Suzanne Chappaz-Wirthner, ethnologue, développe dans un texte théorique les ramifications que ce textile lui suggère. 

Commissariat: Eliane Beytrison et Suzanne Rivier[-Devèze]

Durant plusieurs années, l’artiste Eliane Beytrison a réalisé des croquis dans le Service des soins intensifs des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Dans cet univers si particulier, l’incertitude entre vie et mort, l’oscillation entre crainte, espoir et parfois deuil sont omniprésentes. A côté de sa pratique artistique, Eliane Beytrison y fait le lien entre les familles des patients, les soignants et les médecins. C’est grâce à cette proximité attentive, à son respect, et à la confiance que lui ont témoignée les protagonistes de cette lutte permanente, que ces dessins ont pu voir le jour. En cela, ils représentent un témoignage exceptionnel, qui a déjà fait l’objet de plusieurs expositions. 

En 2020, la pandémie de Covid-19 a donné lieu à un grand bouleversement et de nouveaux protocoles de soins. Les soignants, mis à rude épreuve, ont été heureux d’accueillir à nouveau Eliane Beytrison, son regard apportant alors une échappée bienvenue. De nombreux croquis ont été réalisés durant cette période et certains d’entre eux sont réunis ici dans un chapitre distinct.

Présentant les œuvres réalisées en Chine entre 2016 et 2017, le volume retrace également les principales recherches menées par François Ruegg entre 1985 et 2015, mettant en lumière le fil conducteur qui relie ses créations multiformes. 

En annexe: biographie, expositions, bibliographie, etc.

Textes en français, anglais, chinois

> Il existe un article de Laurence Chauvy : “François Ruegg, la porcelaine entre être et paraître” dans Le Temps, 09-01-2018. PDF de l'article à télécharger ici

> voir aussi l’article d’Etienne Dumont: "L'Ariana propose les sculptures céramiques voilées de François Ruegg" dans Bilan, 05.10.2017

« Manger un fruit. Un fruit inconnu dans une ville inconnue. Un frisson, un goût, une amertume, une curiosité piquante. C’est entrer dans une ville. L’accès au bord de l’eau. Un fleuve. La mer. Une langue de désert. Des yeux noirs comme des étoiles. D’un geste on invite. A l’ombre d’un arbre, d’une racine, d’un rocher. Les mots se propagent dans la pulpe qui draine parfums et écœurements. Il ne me reste plus qu’à marcher, aller, venir, d’un centre à une périphérie, du noyau regarder partout, humer l’ombre, chercher un lit, boire, respirer, redessiner cent fois la même forme, suivre cent fois la même ligne. Cueillir toutes les plantes, les plus échevelées aussi, et les racines grises. Tout en regardant et définissant ma récolte, je laisse le suc d’un abricot, d’une framboise, d’une orange, d’une grenade glisser dans ma gorge, alcool d’impatience. Des fleurs ponctuent mon sommeil. Un café demain. Brûlant, serré. Un rideau de pluie laisse transparaitre la toute petite île inhabitée. C’est là que m’attendent mes carnets. » EB

« Danseuse et chorégraphe de formation, j’explore le corps par la danse, mais aussi au travers des arts visuels (dessin, aquarelle, photographie, vidéo…), du chant et de l’écriture. En 2006, à la recherche de la perception de l’origine du geste dans mon corps, j’ai dessiné tous les jours dans des carnets. Ces dessins incarnent un point de départ, matérialisent une réflexion qui a irrigué la suite de mon travail. »   

« Since I am a dancer and choreographer by training I search to understand the human body by dance, but also through the practice of visual arts (drawing, watercolor, photography, video…), singing and writing. In 2006 as I was trying to understand the origin of my body movements I was making daily drawings in my notebook. These drawings explain visually the starting point of my work, as they illustrate how my subsequent thoughts are evolving. »

« Des lieux traversés, explorés ou scrutés. Donner à voir, au travers d’une construction, d’une architecture, la force émotionnelle d’un espace, suggérer le vécu des humains qui y vivent sans même les montrer. Ou faire affleurer la force et l’étrangeté contenues dans un objet banal. » EB

Nés d’un regard empathique et perçant, ces dessins évoquent un cheminement intérieur autant que géographique. 

« François Ruegg use à dessein de l’allégorie pour teinter la présence figurative de ses objets d’allusions complexes. Il s’amuse de nos attentes, de nos clichés, nous pousse dans d’étranges cheminements de pensées, nous égare délibérément, remet en cause nos repères, instaure le trouble dans nos perceptions. Il provoque, déstabilise, se livre partiellement, cède quelques clefs de lecture… Reste au spectateur la tâche de s’emparer des objets, et d’accepter de se perdre (un peu) dans le dédale des suggestions formelles. » MP

Contre les fake news, la désinformation à grande échelle, les Archives semblent un rempart essentiel. Conserver et garantir l’accès à des informations vérifiées, fiables, devient un réel enjeu démocratique. Pourtant il est difficile de se maintenir à la hauteur de cette exigence. Au regard de l’obésité informationnelle, la nécessité de la sélection conduit à des choix cruciaux, bien plus aigus que par le passé. Ces choix doivent prendre en compte non seulement les documents eux-mêmes, papier ou numériques, mais aussi les ressources nécessaires pour assurer leur pérennité. 

Choix archivistiques, choix politiques et budgétaires, choix d’économie des ressources… Face à ces nouvelles contraintes Barbara Roth-Lochner et Alain Dubois font aujourd’hui le point sur cette évolution, et, à la lumière de leurs expériences, esquissent pistes de réflexion et perspectives pour l’avenir.

En 1873, Alphonse de Candolle écrivait : « Les cantons suisses de Genève, Vaud et Neuchâtel achètent plus de livres et de journaux sur les sciences que les populations vingt fois plus nombreuses des pays adjacents ». En 2019, Genève est l’une des villes au monde qui compte le plus grand nombre de livres par habitant. Il fallait bien que l’informatique vienne en aide aux bibliothèques ! 

Histoire d’une (r)évolution raconte ces années durant lesquelles les bibliothèques genevoises sont passées de l’ époque des fiches cartonnées à celle des catalogues informatisés, des échanges de données, puis à l’ère d’Internet et du cloud computing. Il fallait bien un livre pour relater cette vaste aventure…

> Compte-rendu d’Alex Boder, 15.02.2021

> Compte-rendu de Jean-Philippe Accart

Beaucoup d’usages sont tellement ancrés dans nos vies que l’on ne s’interroge guère sur la manière dont ils sont advenus. Il est difficile d’imaginer aujourd’hui que le domaine institutionnel des bibliothèques ait joué un rôle important dans l’avènement et l’expansion des réseaux informatiques et des échanges qu’ils génèrent. Cela est pourtant une réalité. Le dynamisme des synergies entre bibliothèques, au plan suisse voire international, ont même permis le développement et la normalisation des échanges intercantonaux. 

Ce livre d’entretiens fait apparaître en quoi Jacques Cordonier, Alain Jacquesson, Jean-Frédéric Jauslin et Hubert Villard, directeurs romands parmi les plus marquants de la fin du 20e siècle, chacun avec son regard et sa tessiture, dans son canton ou à la Bibliothèque nationale, ont contribué à mettre en place ce qui est peu à peu devenu une norme dans les pratiques sociétales du 21e siècle.

> Compte-rendu de Jonas Beausire

> Compte-rendu de Jean-Philippe Accart

> Compte-rendu de Jean-Philippe Accart

Dès le début de sa vie professionnelle Sidya Ndiaye s’est engagé sans relâche pour améliorer les conditions de travail des salariés de son pays. Son credo est à la fois simple et fondamental : pour obtenir des progrès concrets, il ne faut dépendre d’aucun pouvoir, qu’il soit financier, religieux ou politique. C’est ainsi qu’il a joué un rôle déterminant, au début de son parcours syndical, dans la création d’un syndicat autonomiste permettant de revendiquer un statut pour les employés des collectivités locales. 

Sur cette base, Sidya Ndiaye a su impulser une dynamique plus large, et en tant que secrétaire général de la Fédération générale des travailleurs du Sénégal (tendance B), il est venu durant de nombreuses années aux réunions de la Conférence internationale du Travail organisée annuellement en Suisse, à Genève, pour défendre les droits des travailleurs. 

Il importait de mettre en relief son long engagement pour plus de justice et d’équité sociales. Ce récit retrace le chemin parcouru.

Noé Dubois | Photographies : La première publication d’un jeune photographe animalier passionné, entre Jura et autres biotopes. 

« Ce que j’apprécie par-dessus tout dans la photographie, c’est la trouée qu’elle ouvre sur le monde sauvage. L’animal, par son attitude ou son regard, est toujours très expressif. Il a sa propre manière de communiquer. Il me laisse approcher une part de sauvage, d’inconnu. Une part qui ne demande pas à être comprise mais seulement entrevue.

Je ne conçois pas la photographie animalière d’un point de vue documentaire. Les animaux de mes photographies sont communs, ils ont déjà été décrits et observés. Faire une image sur laquelle on peut compter chaque plume ne m’intéresse pas. Je cherche plutôt à exprimer l’instant de la rencontre, par la composition avec le milieu, les couleurs, la lumière. Et je privilégie souvent un cadre large pour permettre au spectateur de s’imprégner de cette atmosphère. » Noé Dubois 2022

« Nous avons quatre heures de cheval avant d’arriver à Baalbek, et notre route est toujours de celles auxquelles nous sommes habitués : chemin pierreux, à peine tracé, qui nous mène à travers des montagnes, des vallées ou des rivières. Enfin, un versant de montagne nous amène en face de Baalbeck. Nous voyons de bien loin les six majestueuses colonnes qui se détachent contre le ciel, et à leur pied et alentour, d’autres ruines. Nous poussons des cris d’admiration et d’enthousiasme, mais nos transports sont vite arrêtés par une averse plus forte que toutes les précédentes et équivalant à un bon seau d’eau froide. Nous hâtons le pas de nos chevaux, ne pensant plus qu’à arriver au plus vite. Impossible de camper au milieu des ruines, comme cela se pratique par le beau temps; heureusement Baalbeck possède un bâtiment que les propriétaires décorent du nom d’hôtel: notre guide s’empresse d’aller nous en assurer la jouissance, et nous nous hâtons de nous y réfugier. »  Journal, 13 avril 1876

Certains racontent leurs vies, d’autres, leurs voyages… C’est ici le récit d’une grande passion « qui fut et demeure la sienne » que nous livre Étienne Orsini. 

En empruntant au haïbun, ce genre littéraire mêlant prose et haïku, il retrace ses quinze années d’apprentissage et de pratique amateur de la polyphonie corse. 

Une histoire faite d’amitiés et d’aventures souvent cocasses. Un autre regard sur la Corse et sa diaspora.

Chemins de terre reprend, très peu réécrits, les propos de Claude Albana Presset tenus lors d’entretiens en 2017 et 2018, des extraits de L’Argile, son mémoire de diplôme de l’Ecole supérieure des arts visuels de Genève rédigé en 1989, ainsi que des notes manuscrites préliminaires à une conférence de 1984. La liste des objets donnés ou collectés pour le Musée d’ethnographie de Genève à l’occasion de ses voyages complète ces récits.

Le Journal de voyage au Japon (1960-1961) est un texte inédit, écrit au jour le jour puis envoyé régulièrement à ses proches. Claude Albana Presset a alors vingt-six ans et est mariée depuis quelques années avec le sculpteur Henri Presset (1928-2013). Elle effectue ce voyage, longtemps rêvé, en compagnie de la jeune céramiste suédoise Christine Biuw, pour étudier la céramique japonaise. Leur approche concrète du travail céramique au Japon tel qu’elles ont eu le privilège de l’aborder auprès des plus grands maîtres est encore très rare à l’époque. Claude Albana Presset est d’ailleurs la première Suissesse à bénéficier de cet enseignement. Cette expérience exceptionnelle se double d’une vision intimiste de la vie quotidienne chez leurs hôtes, et de multiples rencontres qu’elle donne à voir avec candeur et affection.

A cette époque, écrire des lettres, faire son courrier, était la meilleure façon de rester en contact avec les siens, de raconter ses expériences et d’exprimer ses émotions. Les lettres d’Hélène Mallet nous font partager un long voyage familial en Méditerranée orientale, qui dura quatre mois, du 2 janvier au 2 mai 1891. 

Les textes des lettres sont accompagnés en vis-à-vis des commentaires de Yolande Vernes-Crowe, souvent indispensables à une meilleure compréhension ou mise en perspective historique du voyage.

Ce texte, extrait de la somme d'Eugène Rambert Les Alpes suisses, a été le premier livre numérique publié, sous format Epub, par L'Esprit de la Lettre. Enrichi d'un index des plantes citées, il est présenté ici dans sa version en PDF. 

[…] Pendant ces jours nébuleux, au plus fort d’un hiver dont la rigueur est exceptionnelle, cette brillante flore des Alpes m’a poursuivi de son image; c’était comme une idée fixe, comme un de ces refrains qui durant des jours et des semaines, se chantent d’eux-mêmes dans la mémoire, et qu’on fredonne sans y songer. Au lieu de s’envoler comme tant d’autres, ce rêve tout composé de souvenirs est devenu de plus en plus clair et vivant; si bien que j’ai essayé de le saisir et de le fixer. […]

Au fil du rail. Correspondances est composé de textes courts, en deux parties, fruits de multiples pérégrinations ferroviaires. 

Avec une curiosité un peu détachée, Isabelle de Riedmatten met d’abord en relief des attitudes, des expressions, des interactions ou des égoïsmes, dépeint sans complaisance quelques protagonistes de ces rencontres éphémères. 

Puis l’imagination prend le relais. D’autres personnages, d’autres lieux, entrent en résonance. Des fragments de vies se dessinent, plus fragiles, parfois ancrées dans des pays bien éloignés du confort helvétique. 

Des aller-retours percutants entre réel et romanesque.

Ce livret contenant une fiction faisait partie intégrante de l'exposition TRAMES. Il était mis à la disposition du public dans une salle de l'exposition et joint au catalogue. 

L'exposition était axée sur la présentation d'une "couverture" textile composée de couvercles de boites d'allumettes en carton reliées au crochet, découverte en Italie vers la fin du XXe siècle. Un objet improbable, qui a suscité des interrogations diverses, factuelles et théoriques. Et finalement, l'imaginaire prenant le relais, qui a induit les protagonistes de ces Trames à mettre en forme les évocations qu'elle a fait naître.

De courts poèmes buissonniers qui ouvrent un œil étonné sur la vie. 

Des images qui magnifient l’éclat des instants minuscules.